Pourquoi des blocs de littérature en classe 7?
Cette année, pour la classe 7, j’ai intégré des blocs de littérature pour mes filles. La classe 7 correspond à la 5ème. Selon la progression Steiner, à partir de la classe 3, on fait du français tous les jours ; les nouvelles notions grammaticales sont introduites lors des blocs, et le reste de l’année, on pratique un entraînement et une consolidation grâce aux exercices sur ces notions…
Notre premier bloc portait sur les romans d’aventure.
Concrètement, voici comment nous procédons depuis septembre dernier : chaque semaine, il y a une leçon de grammaire avec ses exercices, une dictée préparée, de l’orthographe d’usage et de l’orthographe grammaticale avec exercices, une étude de la littérature avec aussi du vocabulaire et un travail de rédaction. Et en parallèle, on fait quelques oeuvres entières lors des blocs de littérature. Ceci est le fruit d’une réflexion patiente à partir de ce que je lisais à droite ou à gauche, mais aussi à partir de notre propre expérimentation.
En fait, l’an dernier, je n’avais pas fait de bloc de littérature en tant que tel. Je m’étais contentée de lire avec elles des extraits d’oeuvres ou des oeuvres entières, d’en discuter longuement (comme nous faisions d’ailleurs depuis des années), avec des questions de compréhensions, un accompagnement assez personnalisé afin qu’elles construisent une réflexion à partir de ce qu’elles lisent, sachant qu’elles lisent beaucoup.
L’objectif était assurément de leur faire approfondir leur très belle aptitude à la lecture, de leur permettre, progressivement, de comprendre les clés des grands mouvements et des genres littéraires, et de se forger une réflexion.
Avec du recul, je m’aperçois souvent que lorsque je ne fais pas quelque chose parce que ça ne me parlait pas, il y a au fond toujours une bonne raison à cela. Ici, il me manquait surtout de trouver l’organisation et le type d’apprentissage qui faisaient sens pour nous.
Et voici, de fil en aiguille, ce qui a jailli : l’an dernier, j’avais regardé un peu comment étaient faits les manuels de 6ème du public et était demeurée assez dubitative.
Il me semblait d’une part que, pour qu’un enfant puisse suivre correctement de tels manuels, il était sous-entendu qu’il avait déjà déjà besoin d’un (très) bon niveau de grammaire tant les leçons sont synthétisées et étriquées ; en toute humilité, cela ne correspondait pas au niveau de mes filles (et à mon avis, ça n’est pas le cas non plus le cas de bon nombre de collégiens vu ce que je peux constater par moi-même autour de moi…)
D’autre part, pour moi, tous ces manuels ont beaucoup trop de photos, de flèches, de grands titres qui semblent ne faire que boucher des trous et donner l’illusion d’un contenu riche, de petits paragraphes qui ont l’air d’avoir le même but que précédemment… Mais je ne vois pas grand chose qui permettent à l’enfant de construire un raisonnement, un savoir. J’ai d’ailleurs le même sentiment face aux manuels de langue étrangère…
De fait, je n’étais pas pour les utiliser avec mes filles. Les avoir sous la main, oui ; regarder ce qui se fait : oui ; justifier de l’utilisation de ces manuels auprès de l’inspection : oui. Mais laisser les enfants travailler dessus : non, sauf pour leur montrer ce qui leur serait demandé si elles allaient en école classique (ce point de vue est toujours enrichissant).
C’est donc ainsi que j’en suis arrivée à décider que, pour tout ce qui touche l’étude de la grammaire et de l’orthographe (grammaticale ou d’usage), j’utiliserai une progression séparée, et personnalisée aux difficultés que je peux encore observer chez mes filles avec l’objectif de les accompagner vers l’analyse grammaticale ; il m’est facile de repérer les difficultés lors du travail, de les noter sur mon journal de bord, et de préparer des révisions des notions qui ne sont pas acquises.
Il m’est ensuite également très facile d’intégrer les notions vues ou revues à notre étude des textes littéraires. Par ailleurs, je ciblais quelques oeuvres à étudier in extenso dans le cadre des blocs, accompagnant celui-ci d’un travail de rédaction plus conséquent.
Après plusieurs mois à travailler de cette manière, je suis (presque) éblouie (si, si!) des progrès réalisées par mes filles et ce à plusieurs niveaux : intégration des règles grammaticales et des règles orthographiques, mais aussi je constate avec ravissement que l’étude de la grammaire de manière séparée soutient totalement la construction de leur raisonnement et l’acquisition d’une analyse plus fine en général, et, en particulier, elle vient renforcer l’étude des textes.
D’elles-mêmes, lors de leurs lectures solitaires ou lors de l’étude des textes ou des œuvres que nous lisons ensemble, elles transposent ce qu’elles ont appris lors des séances de grammaire et sont enchantées de me faire remarquer ce qu’elles ont trouvé…
Autant dire que je ne regrette pas un seul instant d’avoir osé faire différemment.
Bloc de littérature sur le roman policier
Notre dernier bloc de littérature portait sur le roman policier. J’ai eu la joie de leur faire découvrir un des auteurs majeurs de ce genre : Agatha Christie et son « Dix petits nègres ».
A chaque séance, je leur faisais la lecture de cette œuvre ; s’ensuivaient des questions de compréhension et des points de cours leurs permettant de construire le schémas narratif du roman policier. Volontairement, je n’ai pas beaucoup chargé les séances afin qu’elles disposent de temps pour imaginer puis rédiger une nouvelle policière qui reprendrait ce schéma narratif.
Au départ, elles n’étaient pas très enthousiastes à l’idée de passer du temps sur le roman policier. Mais la magie s’est exprimée au fur et à mesure de ma lecture et je me suis retrouvée avec deux jeunes filles posant passionnément des questions et débattant des suspects, échafaudant des hypothèses, supputant sur les divers protagonistes !
Ah, comme j’étais heureuse ! Comme j’aime ces moments où nous lisons ensemble ! Leur goût profond pour la lecture s’origine dans toutes ces heures où nous avons dévoré ensemble des livres depuis leur plus jeune âge ; c’est un lien qui nous unit puissamment !
Néanmoins, j’avais un deuxième objectif en leur faisant faire ce bloc. Depuis leur plus tendre enfance, elles adorent la littérature du merveilleux ; rien d’extraordinaire pour deux enfants qui ont été nourries aux contes, et bercées par la pédagogie Steiner ! Cela les a mené presque naturellement à beaucoup apprécier la littérature fantasy à laquelle je les ai moi-même initiées avec Bilbo le Hobbit et Harry Potter…
Ce genre ayant gagné ses lettres de noblesse, il est important de savoir le distinguer de genres proches, d’autant que les frontières sont éminemment souples entre le fantastique, la fantasy, la science fiction, voire le roman policier, etc. On le voit d’ailleurs avec les accents fantastiques empruntés par les Dix petits nègres.
Il est donc important, notamment pour des personnes qui sont autant passionnées de lecture, de pouvoir s’y retrouver. Voilà donc pas mal de temps que je leur parle de ces différents genres ; le bloc était aussi l’occasion de mettre davantage en pratique ce que nous avions dégagé, mais d’une manière plus approfondie.
Au début d’ailleurs, je souhaitais faire un bloc Romans policiers et romans fantastiques, mais j’ai revu mes ambitions à la baisse ; c’était trop pour un seul bloc. Néanmoins, comme j’avais acheté un certain nombre de livres pour construire ce bloc, je leur ai permis de lire presque tout ce que j’avais pris, fantastique, policier et science fiction confondus, hormis quelques titres gardés en réserve pour l’an prochain.
Ce fut donc l’occasion de beaucoup parler des différents genres et d’enrichir ainsi la réflexion de deux jeunes filles très fières de tout ce qu’elles apprennent ! littérature littérature littérature littérature